You are currently viewing Le sommeil des requins, une caractéristique très variable
Crédit: Arthur ORY

Le sommeil des requins, une caractéristique très variable

 Comme pour une très grande partie des vertébrés, le sommeil est une phase vitale pour les requins.

 

 

Le terme « sommeil » est cependant très large. En effet, ces phases de profond repos, qui peuvent arriver au stade de l’inconscience, sont très différentes du sommeil tel que l’on peut l’entendre chez les humains.

Des variances comportementales, fruit de l’évolution dans l’environnement...

Parmi toutes les caractéristiques physiques et comportementales que l’on peut retrouver chez les êtres vivants, certaines peuvent être retrouvées chez différentes familles et différentes espèces.

En revanche, il est important de différencier les caractéristiques dites, homologues, des caractéristiques analogues.

 

Par exemple, les phalanges, métacarpes et métatarses que l’on retrouve dans nos pieds et dans nos mains, sont phylogénétiquement très proche de celles que l’on retrouve chez les dauphins et les baleines. C’est une caractéristique que nous avons héritée d’un ancêtre commun : très probablement le cœlacanthe. On parlera ici d’un trait homologique.

 

En contre exemple, les requins et les arthropodes sont phylogénétiquement très éloignés. Les requins font partie des deutérostomiens, comme nous, et les arthropodes des protostomiens. Pour faire simple, dans la génétique animale, ces deux groupes sont extrêmement éloignés.

 

Mais ce sont deux groupes dans lesquels on retrouvera des espèces qui peuvent pratiquer le « sommeil ». Cependant ici, ce n’est pas une caractéristique issue d’un ancêtre commun, mais une adaptation comportementale à leur propre évolution. À première vue, ces comportements semblent identiques. Mais d’un point de vue scientifique, on peut seulement dire qu’ils se ressemblent. On parle ici de trait analogique.

 

 

Le sommeil semblerait être une conséquence de l’apparition du cerveau, dans le sens où cette « pause » serait indispensable à tous les cerveaux, qu’ils soient issus d’une même lignée ou non. Mais aujourd’hui encore, on ne comprend pas réellement la place du sommeil ni sont utilité.

Et les requins dans tous ça ?

Il faut déjà comprendre que, chez les 530 espèces de requins répertoriées, on trouve des individus drastiquement différents sur les plans physique et comportemental.

 

 

On peut déjà définir deux classes comportementales chez les requins : les actifs, ceux qui doivent constamment rester en mouvement pour s’oxygéner, comme le grand requin blanc (Carcharodon carcharias),  le grand requin marteau (Sphyrna mokarran), etc.

Et les sédentaires, qui peuvent rester immobile et dormir au fond de l’eau, majoritairement des petits requins, comme les petites roussettes ou les requins pyjama.

 

 

Serge Melesan requin corail
Crédit : Serge Melesan

Mais alors c’est la taille du requin qui définit s’il est actif ou sédentaire ?

Et bien non, ce n’est pas le seul caractère, on remarque en effet que la majorité, si ce n’est la totalité des petits requins, disons de moins de 1 mètre en taille maximum, peuvent très bien rester sédentaire au fond de l’eau et dormir des heures de suites.

 

 

Mais cela ne veut pas dire que les grands requins, pouvant dépasser les 3 mètres, doivent obligatoirement rester en mouvement.

En effet, requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), qui mesure en moyenne 3 mètres mais peut atteindre 4,30 mètres, peut dormir jusqu’à 20 heures par jour.

Et il n’aura aucun problème à s’oxygéner en étant immobile.

 

 

Le 28 juin 2016, un grand requin blanc (Carcharodon carcharias) a été filmé pour la première fois en train de dormir. Il n’avait pas les yeux fermés, n’était pas immobile, mais il présentait un comportement jamais observé auparavant.

 

 

Il était positionné quelques mètres au-dessus du fond, face au courant et nageant le minimal nécessaire pour rester « stationnaire ». Il avait la bouche entre-ouverte afin de maximiser l’oxygénation au niveau des branchies.

 

 

Avant cette vidéo, aucun grand blanc n’avait jamais été filmé en train de dormir, et il existe encore beaucoup d’espèces de requins qui n’ont, jusqu’à présent, jamais présentées de comportement somatique.

Alors que peut t’on en conclure ?

Il semblerait que l’activité somatique d’un requin soit d’une part liée à son mode de vie alimentaire mais également à sa taille.

 

Les petits requins vivants, plutôt sur le monde benthique, le fond des océans, auront beaucoup moins tendance à se déplacer en continu, et donc beaucoup plus tendance à dormir. Ces requins se nourrissent généralement de petits crustacés, de crabes ou de crevettes, leurs proies ne leur demandant pas forcément de gros efforts, ils auront forcément besoin de peu d’oxygène.

 

Les gros requins en revanche, qui peuvent chasser des mammifères marins bien plus agiles qu’eux sous l’eau, doivent faire preuve d’innovation de méthode et de dextérité. Leur masse et leur taille sont beaucoup plus importante que celle des requins cités précédemment.

 

Ils ont donc besoin de beaucoup plus d’énergie et donc plus d’oxygène.

Pour revenir au requin nourrice (Ginglymostoma cirratum)ce dernier se nourrit également de crustacés, de langoustes, de crabes, etc. Et son comportement est plutôt sédentaire, comme nous avons pu le voir.

 

Il semblerait donc que l’activité somatique d’un requin soit directement liée à son comportement et à la nature de son spectre alimentaire. Il y a cependant beaucoup d’autres facteurs pouvant définir ce caractère. On peut trouver des petits requins pélagiques qui ne se pose pas au fond.

Il reste encore beaucoup de mystères autour de la place du sommeil dans la vie d’un animal, mais il est certain que c’est un comportement essentiel et surtout extrêmement variable et subjectif à chaque espèce.

 

Sources

Arthur Ory

Âgé de 20 ans, je suis passionné par la mer et par les requins depuis l'enfance. Je plonge en apnée depuis l'âge de 6 ans et je suis niveau 2 en bouteille. Excepté cela, je suis bénévole dans l'association Des Requins et Des Hommes et je suis en deuxième année de licence de biologie.

Laisser un commentaire